CARRÉ SAINT-HONORÉ – 56 FAUBOURG SAINT-HONORÉ

Carré Saint-Honoré
Le projet fondateur d’Archibuild

Le Carré Saint-Honoré est le projet fondateur d’Archibuild et de son créateur François-Xavier Barade. Il a marqué un véritable tournant, à la fois pour l’agence, qui y a exprimé pour la première fois sa vision architecturale, et pour son fondateur, qui y a posé les bases du design fluide : une méthode où les contraintes deviennent des atouts, et où chaque intervention dialogue avec l’histoire et l’esprit du lieu.
Conduit en site occupé sur plus de 12 années, ce chantier a été mené en 23 phases successives, en corps d’état séparés, révélant la capacité d’Archibuild à transformer un patrimoine exigeant tout en assurant sa continuité d’usage.

Un immeuble historique à forte identité
Construit en 1913-1914, l’immeuble se distingue par ses façades rue en pierre et ses façades cour en brique, portées par une structure métallique poteaux-poutres assemblée sur site. Les cages d’escalier conservent leur décoration d’origine tout en courbes, tandis que les ascenseurs d’époque, comparés à des œufs de Fabergé, ont disparu.
Restructuré en 1988 dans un esprit peu respectueux, l’immeuble avait alors subi des interventions lourdes : création d’un hall par annexion de la surface commerciale, recoupement du sous-sol en parkings, installation de fenêtres en PVC avec des impostes miroirs pour masquer les plénums de faux-plafonds, ou encore comblement de courettes. Le projet d’Archibuild a cherché à réhabiliter et réinventer ces espaces en redonnant à l’immeuble une cohérence architecturale et une qualité d’usage durable.

Des interventions innovantes et emblématiques
La cour d’honneur a été repensée autour d’un ruban de déambulation fluide, inspiré de la fontaine de Mercure de Calder. Cette intervention répondait à la nécessité de desservir six accès à des altimétries différentes tout en offrant une expérience architecturale singulière. Elle constitue le tout premier exemple de design fluide.

Le jardin suspendu, conçu avec Cathy Viviès et les Jardins de Babylone, est à la fois une prouesse technique et une œuvre poétique. Accroché en douze points, il flotte au-dessus de la verrière avec une flèche limitée à seulement 80 cm, donnant l’illusion de défier la gravité malgré ses cinq tonnes. Véritable écrin végétal dans une cour minérale, cet aménagement inédit introduit une nature suspendue et inattendue au cœur de l’architecture. Inspiré d’une œuvre de Tomas Saraceno – une toile d’araignée enfermée dans une cage de verre, exposée au Carré d’Art de Nîmes – il traduit la même fascination pour l’équilibre et la légèreté. Cette réalisation unique a été récompensée par les Victoires du Paysage en 2016.

La marquise, quant à elle, a été imaginée comme une porte tambour sur mesure insérée dans la baie existante. Comparable à un bijou et inspiré des œufs de Fabergé, elle fait écho aux ascenseurs historiques disparus et s’est imposée comme une signature architecturale forte, surnommée « Madame la Marquise ».

Le hall d’entrée reprend le vocabulaire courbe de l’immeuble, avec des poteaux métalliques laissés apparents, un plafond rétroéclairé imprimé des plans d’origine, un sol en terrazzo et une banque d’accueil en résine.

Les façades ont été intégralement restaurées, avec le remplacement de 700 fenêtres en bois, dont 40 % en site occupé, et la restitution des bow-windows d’angle en acier.

Dans les bureaux, le concept de faux-plafond en staff a permis d’épouser les contraintes structurelles tout en intégrant les réseaux techniques, libérant ainsi les volumes et créant des courbes élégantes et pérennes.

Les sanitaires ont introduit une innovation marquante : chaque cabine intègre sa propre vasque et son miroir, supprimant la logique des lavabos collectifs. Ce dispositif offre plus de confort et d’intimité, tout en optimisant l’espace disponible.

Enfin, les cages d’escalier ont retrouvé toute leur noblesse grâce à une moquette inspirée de l’univers de la mode du quartier et à une cascade lumineuse signée Cécile Wright, qui renforcent l’identité unique du lieu. Cet espace fut aussi la première intervention de Sophie de Courcy (Studio Archibuild), qui y a posé les bases de son approche sensible et innovante de l’architecture intérieure.

Cette rénovation a également marqué une étape décisive pour François-Xavier Barade, qui y a formulé une conviction forte : en réhabilitation, les contraintes et les défauts ne sont pas des obstacles mais des leviers de création.

Les plafonds staff, devenus depuis un archétype de l’agence, en sont l’illustration. Conçus pour intégrer les réseaux techniques (climatisation, électricité) tout en respectant l’architecture d’origine, ils tirent parti des spécificités du lieu : fenêtres montant jusqu’à la dalle supérieure et faibles hauteurs sous plafond. Là où une rénovation précédente avait obstrué les impostes en façade en filant le faux plafond jusqu’aux fenêtres, nous avons choisi de le sculpter pour libérer la lumière et magnifier la structure. Les poteaux, laissés apparents, s’élèvent désormais dans un halo lumineux qui en révèle toute la force.

Dans le même esprit, Sophie de Courcy a également introduit l’usage de la couleur dans les plateaux de bureaux. Une démarche novatrice à l’époque, qui a contribué à personnaliser et moderniser l’identité du lieu – une signature qui imprègne encore aujourd’hui ses projets.